Victor Julien-Laferrière musicien libre et enthousiaste

En possession d’un vaste répertoire, le violoncelliste Victor Julien-Laferrière aime découvrir des œuvres souvent méconnues du public ou rarement jouées. Il sera à la Seine Musicale avec l’Orchestre Insula pour interpréter sur instruments anciens deux pièces pour violoncelle et orchestre signées Jules Massenet et Théodore Dubois.
En remportant en 2017 à Bruxelles le premier Concours de violoncelle Reine Elisabeth, Victor Julien-Laferrière avait braqué les projecteurs sur lui mais il était loin d’être un inconnu. En effet, cet artiste aux talents multiples menait déjà de pair une activité de soliste et de musicien de chambre au sein du Trio des Esprits, formation très prisée du monde musical. En remportant en 2018 les Victoires de la Musique classique dans la catégorie « Soliste instrumental de l’année », il concrétisait une expérience de haut niveau qui s’appuyait sur un apprentissage instrumental acquis au CNMSD de Paris dans la classe de Roland Pidoux puis auprès de Heinrich Schiff à l’Université de Vienne et Clemens Hagen au Mozarteum de Salzbourg tout en se perfectionnant à l’Académie de Musique de Seiji Ozawa en Suisse. Outre son activité de violoncelliste très prenante, Victor décide en 2019 de fonder l’Orchestre Consuelo qui prendra son envol en 2021 : « Déjà enfant, j’étais attiré par la direction, et à douze-treize ans je réunissais des amis et m’entourais de jeunes amis pour former un orchestre occasionnel, mais personne ne m’a jamais poussé à me spécialiser dans ce domaine. Quand je fréquentais Heinrich Schiff, on ne parlait ensemble que de violoncelle, alors qu’il était aussi chef d’orchestre. »
Sur tous les fronts
Victor trouve désormais son accomplissement et une forme de plénitude dans sa double activité à laquelle il ajoute la direction musicale du Festival Les Sensationnelles qu’il a créé en 2020 à Sens dans l’Yonne fin juin et début juillet et qui irrigue la Région. D’autre part, avec l’Orchestre Consuelo qui porte le nom du roman musical éponyme de George Sand, il peut se livrer à sa passion de la direction sans entraves dans un climat propice : « Cette formation très malléable composée de chambristes et de musiciens d’orchestre se réunit par sessions. La jauge est à géométrie variable, allant de quinze à cinquante membres, ce qui permet un travail en profondeur sur des aspects qui échappent à des ensembles moins souples. Nous avons entrepris d’explorer tout un répertoire négligé au disque et au concert. Après les Deux Sérénades de Brahms, nous nous attelons désormais aux Quatre Suites de Tchaïkovski dont les deux premières viennent d’être enregistrées pour le label Mirare. Depuis l’an dernier au Festival d’été de la Chaise Dieu, nous avons débuté sur quatre ans une intégrale des Symphonies de Beethoven jouées et captées dans les conditions du direct avec une intensité que se ressent. Nous apportons notre enthousiasme avec une attention aux détails, aux nuances, à l’articulation et aux phrasés. Parmi nos projets il y a les Symphonies de Schubert, et pourquoi pas une création. »
Un programme rare à la Seine Musicale
Dans le vaisseau amiral de la Seine Musicale, les deux œuvres pour violoncelle et orchestre qui seront présentées sur instruments d’époque ont valeur d’événement : « C’est grâce à la détermination et la curiosité de la Fondation Bru Zane et d’Alexandre Dratwicki, son directeur artistique, que ce concert aura lieu. Avec Laurence Equilbey et l’Orchestre Insula, j’interpréterai deux pages peu fréquentées par les violoncellistes dans le cadre d’une soirée consacrée à Bizet. La Fantaisie de Jules Massenet possède bien évidemment un caractère vocal car on sait combien le compositeur était attiré par l’opéra. Cette page d’une vingtaine de minutes très libre développe différents thèmes tour à tour dramatiques, voire chevaleresques avec de grands moments lyriques. La pièce de Théodore Dubois est plus brève et ravissante dans la grande tradition de la musique française de la fin du XIXe siècle avec des références à l’orgue, un instrument que le compositeur pratiquait à la tribune de l’Eglise de la Madeleine où il avait succédé à Saint-Saëns. D’ailleurs, je pense m’investir dans ce répertoire en prospectant les partitions de George Onslow très appréciées de Berlioz et dignes du plus grand intérêt. »
Michel le Naour - publié le 01/06/25